Éditeur : Réplique et Pic, spectacle « Circulez y’a tout à voir »

A Séné, l’art populaire au sommet, par Gérard Alle

« C’est une aventure hors du commun qui a duré près de deux ans. Une trentaine d’habitants de la petite ville de Séné, près de Vannes, m’ont fait cadeau de l’histoire de leur vie. J’en ai tiré 27 textes, que j’ai tissés pour en faire une pièce de théâtre. Deux metteuses en scène, Laurence Pelletier et Anne Le Joubioux ont ensuite initié les participants aux techniques du théâtre. L’expérience, présentée lors de quatre représentations, a donné un résultat proprement époustouflant, mis en images par Bruno Pilorget.

Merci à Bruno. Merci à tous et à toutes pour ces beaux, ces tendres, ces émouvants moments passés ensemble. Bravo, mille bravos pour avoir su digérer et assumer ces textes sortis de vos tripes et les exigences de la représentation, qui met à nu le corps, la voix, l’être dans ce qu’il a de plus intime. Et avec quel talent ! Vous avez pu mesurer à quel point le travail artistique – dont on se moque souvent – est un travail délicat qui demande du courage, de la volonté, de la ténacité, et à quel point il peut être harassant, parfois. Mais vous avez pu aussi mesurer à quel point il peut nous permettre d’être meilleurs, de nous ouvrir au monde, et même de nous transformer. Vous m’avez transformé aussi, les uns et les autres, par votre confiance, votre humanité, votre force inébranlable.

J’ai beaucoup appris à votre contact. Sur moi-même, aussi. J’ai compris que ce que j’aimais le plus, finalement, c’est cette pâte humaine, écouter et retranscrire, avec le plus d’honnêteté possible. M’effacer pour me mettre dans la peau de l’autre. Toutes les expériences d’écriture qui vont dans ce sens sont celles qui m’ont le plus marqué. Et la vôtre, plus que toute autre. Il n’y a pas de gens « ordinaires ». Mais il y a trop de gens, malheureusement, que l’on n’écoute jamais. Et il y a aussi pas mal de gens qui mentent ou qui se mentent. En étant vous-mêmes, tout simplement, vous avez donné naissance à un magnifique spectacle populaire, et démontré – s’il le fallait encore – que populaire ne veut pas dire gnangnan ou bas du front.

Certains intellectuels ou gens de pouvoir qui se croient tellement au-dessus du peuple feraient bien de méditer là-dessus : quand on donne le temps, les moyens techniques, financiers et humains à des gens déterminés, ils ont les capacités d’atteindre un… très haut niveau d’expression. C’était le rêve des militants de l’éducation populaire, avant-guerre. Il a pris une bonne claque ce rêve, avec la création du Ministère et des Maisons de la Culture, ces bunkers culturels aux formes bizarres, construits au cœur des villes pour bien montrer au peuple que la culture, ce n’était pas pour lui. Vous avez chassé les dieux de la culture de leur piédestal prétendument inaccessible, et vous avez pris leur place, à ces vieilles barbes, dans la joie et l’allégresse. Ce faisant, vous avez rendu les gens heureux.
Comme vous, je n’ai qu’une seule envie : recommencer. » G.A.

Une aventure humaine émouvante, par Bruno Pilorget

« J’ai été invité sur ce projet par Anne Le Joubioux, metteuse en scène de théâtre et comédienne, afin de suivre les comédiens par le dessin dans un esprit carnet de voyage.
Il s’agissait dans un premier temps de dessins des répétitions réalisés directement au pinceau à cartouches d’encre noire, très épurés pour essayer de garder l’essentiel, le travail de scène, le mouvement, les regards, les complicités, la personnalité des participants.
Puis en complémentaire de ce premier travail enlevé et spontané, ce sont des portraits des 27 comédiens, réalisés avec des techniques différentes de l’un à l’autre, en fonction de chaque personnalité et du coup de chaque histoire, mise en mots par Gérard Alle et mise en scène par Anne et Laurence. » B.P.

Une exposition de ces portraits accompagnés d’extraits des textes de Gérard a été conçue sous forme de kakemonos et d’encadrements des originaux afin de faire connaitre ce travail remarquable de comédiens amateurs.